Le commerce international à l’époque des Empires africains

La haute époque impériale africaine (300 à 1500) fut un âge d’or de l’histoire du continent noir. Les nombreux Etats entretenaient des rapports économiques avec les 4 autres continents. Cet article vous donnera un aperçu de l’intensité des échanges commerciaux…

Le commerce avec l’Asie de l’Ouest (Moyen Orient)

Des caravaniers Berbères et Arabes parcouraient le Sahara pour échanger divers biens entre l’Afrique et l’Asie de l’Ouest. Le fouet en peau d’Hippopotame fabriqué sur le fleuve Sénégal avait ainsi une réputation internationale selon le chroniqueur arabe Bekri. L’or dont l’abondance en Afrique de l’Ouest était inimaginable était exporté. Le sel, le blé, les raisins secs, les figues quant à eux étaient importés.

Des bols iraniens ont été retrouvés au Mwana Mutapa (Zimbabwe), des  faïences d’Iran et d’Irak dans la civilisation Swahili (Tanzanie-Kenya), des pièces de monnaie Somali aux Emirats Arabes Unis. Les Arabes s’étaient implantés tout le long de la Côte Est africaine – c’est-à-dire la Somalie, le Kenya, la Tanzanie et le Mozambique – et faisaient intensément du négoce avec les Africains.

Peinture du 18e siècle montrant les relations anciennes entre l’Afrique et l’Asie de l’Ouest
Une délégation perse (Iran) est reçue par le roi d’Ethiopie

Le commerce avec l’Asie de l’Est et l’Océanie

Les échanges entre l’Afrique et l’Asie de l’Est étaient principalement le fait de la richissime Côte Est et de l’empire du Mwene Mutapa. Sur toute la Côte Est, une opulente classe de commerçants noirs s’était créée par le billet de ces échanges. Les Africains exportaient leurs produits vers la Chine et l’Inde. La découverte en Australie de pièces de monnaie vieilles de 1000 ans, originaires de la fastueuse ville de Kilwa (Tanzanie), et mises à jour par l’équipe australienne de l’anthropologue Ian McIntosh, permettent d’affirmer que les échanges touchaient aussi l’Océanie.

De la vaisselle de porcelaine chinoise a été découverte dans les tombes du Mwene Mutapa. De l’or, de l’étain, du cuivre étaient extraits de l’empire. Les produits s’écoulaient par le port de Solafa au Mozambique. Les spécialistes ont évalué à 30 000 tonnes la quantité d’étain extraite. Les navigateurs à cette époque étaient essentiellement des Arabes et des Asiatiques.

Malgré l’existence d’une navigation Swahili et l’attestation de Noirs navigant sur l’Océan indien, la richesse de l’Afrique de l’est – où selon un dicton on accédait à des lits d’ivoire par des échelles en argent – ne rendait pas nécessaire pour les Africains l’aventure en haute mer. L’activité minière du Mwene Mutapa servait de levier économique à toute la Côte Est.

Par ailleurs des pièces de monnaie du Vietnam et du Sri Lanka ont été retrouvées en Somalie. Ces échanges ont favorisé l’avènement de relations diplomatiques entre les civilisations Swahili/Somali et la Chine qui y avait des ambassadeurs.

Pièces de monnaie de Kilwa, découvertes en Australie par l’équipe de Ian McIntosh en 2013

Le commerce avec l’Europe

Du temps de la domination des Noirs du Maghreb sur le sud de l’Europe, des échanges commerciaux intenses ont permis l’avènement de riches villes. Pendant la dynastie noire des Almoravides, on se servait de l’or d’Afrique de l’ouest pour frapper des pièces de monnaie qui circulaient dans la partie européenne de l’empire où elles étaient appelées marabotins. Une organisation douanière particulièrement sophistiquée a permis à la civilisation noire du Maroc impérial d’accroitre sa richesse. Les villes d’Espagne, Marseille ou Gênes ont été des plaques tournantes du commerce avec l’Afrique du nord.  

Dignitaires noirs du Maghreb en train de jouer aux échecs en Espagne
Source: the Golden age of the Moor, Ivan van Sertima, page 29

On trouvait ainsi un tissu européen, le montenfès, dont le Mansa Soleyman – empereur de Mali à l’époque du chroniqueur Ibn Batouta – s’habillait. Les Noirs et Blancs berbères et les Arabes étaient les intermédiaires de ce commerce.

Le commerce avec l’Amérique  

Les échanges avec l’Amérique sont également documentés. L’historien africain­-guyanais Ivan Van Sertima, père de l’historiographie sur la présence des Africains en Amérique ancienne, nous en donne des éléments après avoir consulté les archives de Christophe Colomb lui­-même. L’équipage de ce dernier avait vu des Noirs de grande taille en Amérique. Les Indiens d’Haïti avaient dit à Colomb que des Noirs venaient dans de grands bateaux pour faire du commerce. Les navigateurs contemporains de Colomb lui rapportaient qu’il y avait des départs de navires depuis la côte ouest africaine en direction de l’Amérique.

D’après le récit de Ferdinand Colomb, son père Christophe Colomb lui avait dit avoir vu des Africains en Amérique. 

Mais un des éléments le plus affirmatif, est que Colomb ait fait analyser en Espagne une lance d’Haïti, qui contenait exactement la même composition en métaux que celles d’Afrique de l’ouest « 18 parts d’or, 6 d’argent, 6 de cuivre ». Mis à part ce commerce de lances, Van Sertima rapporte la grande présence des Mandingues dans les marchés d’Amérique centrale.

Et ici, contrairement aux relations avec l’Asie, ce sont les Noirs eux-mêmes, de l’empire du Mali puis de l’empire Songhaï, qui empruntaient l’Océan Atlantique.

Mansa Abubakari Keita II du Mali, traversant l’Atlantique en 1312, à la tête de son armada phénoménale de 2000 bateaux.
C’est ce voyage qui aurait inauguré les relations commerciales intenses entre l’Afrique de l’ouest et l’Amérique (Illustration de Khephra Burns)

Hotep !

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction du texte de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)

Notes :

  • Histoire générale de l’Afrique, Unesco
  • L’Afrique noire précoloniale, Cheikh Anta Diop
  • They came before Columbus : the African presence in ancient America ; Ivan Van Sertima
  • Gouvernement du Maroc 
  • CNN 
Partager
Twitter
Partager
Partager
error: Content is protected !!
Retour en haut