La musique en Afrique : origine et fondements

La musique imprègne profondément la culture africaine. L’Afrique et ses descendants ont ainsi contribué de manière centrale au patrimoine musical mondial. Quel est le sens le plus profond des sonorités créées par le Continent Noir ? Elles viennent en réalité d’une pensée bien élaborée. C’est ce que nous allons vous expliquer.  

Afin de mieux comprendre ce qui sera dit ici, nous invitons la lectrice et le lecteur à se se documenter sur la Religion Africaine et la philosophie africaine Maât

Instruments

Au commencement : le Verbe Créateur 

Dans la pensée de nos ancêtres, la musique et le son sont des vibrations cosmiques, qui sont liées à la notion de verbe créateur ou parole divine.

Selon la pensée animiste, au début était l’eau primordiale du Noun, eau sans vie et pleine de particules à l’état endormi. Une particule a pris conscience d’elle-même. C’est Imana/Amen (Dieu). Après être devenu mâture, Imana est sorti du Noun grâce à son énergie Râ. C’est cette énergie qu’Il-Elle a propagé dans le Noun pour faire naître la creation harmonieuse et rythmée. Râ en se propageant dans le Noun, a émis un bruit énorme. C’est le Verbe Créateur ou la Parole Divine.

Ainsi, tout ce qui vit, tout ce qui existe, tout le cosmos, vibre toujours, en émettant un bruit entendu par l’oreille humaine ou non. Tout ce qui est s’anime et vibre toujours de cette parole énergétique, donnée par Râ au commencement.

Imana-Râ ou Amen-Râ, Dieu unique de l’Egypte et de toute l’Afrique

Ici sous sa forme masculine

Qu’est-ce que la musique donc ?

La musique est le résultat de la parole divine créatrice, c’est-à-dire des vibrations, sur les instruments. C’est cette parole qui permet aux musiciens noirs de créer cet ensemble de sonorités, qui constituent une musique, un air, un son. Le but est de reproduire les bruits de la creation harmonieuse et rythmée.

Les divers instruments de musique sont fabriqués selon des rites et des codes bien précis. Ces instruments s’inspirent de la nature et de la création toute entière (son de l’air, son de l’eau, son des vents dans les instruments à vent, etc…).

C’est cette notion d’instrument qui parle qui permet de comprendre les notions comme les messages tambourinés (ex : les Tam-Tam parleurs dont il faut être initié pour comprendre et déchiffrer les messages).

A gauche un musicien de l’époque pharaonique

A droite un initié en train de faire parler le Tam Tam et de lui faire délivrer un message

Pour compléter cette panoplie de vibrations, les musiciens noirs utilisent leurs voix. Chanter c’est donc reproduire la création divine au moyen de la vibration de la voix.

C’est là l’origine des chants en chœurs (chorale, choristes). Les diverses voix sont censées reproduire la création dans toute sa diversité.

Que signifie le fait de danser ? 

Danser c’est vibrer de façon à reproduire la création divine au moyen du corps. La création divine fonctionne selon des cycles réglés par l’ordre, le rythme et l’harmonie divins. Ces notions d’ordre et d’harmonie sont appelées Maât. La création existant selon le cycle, l’ordre et l’harmonie divine, il faut danser selon des pas bien réglés, des mouvements harmonieux, organisés et rythmés. 

La danse imitant l’univers, elle peut reproduire le mouvement de tel ou tel animal, ou telle ou telle action que fait l’être humain, ou le mouvement d’un astre ou d’un phénomène naturel comme la tempête. 

Femmes d’Afrique du Sud, dansant le Domba, chorégraphie initiatique du peuple Venda qui imite les mouvements du serpent

C’est cette notion de Maât qui est à l’origine du rythme dans les musiques africaines, de leur accord avec la danse. La musique en Afrique cherche à associer plusieurs instruments et les accorder avec des voix et des danses, tout ceci dans le but de reproduire la création diverse et rythmée. C’est ce qui fait que la musique est belle à entendre lorsqu’elle est jouée, chantée.

Cette musique est liée à la création divine. Elle est liée au Créateur-la Créatrice, qui fait vivre et s’animer tout l’univers. La musique à l’origine a donc une fonction sacrée, divine. 

Voila pourquoi pour nos ancêtres, il était impensable de faire un culte sans la musique, sans chants. Les Africains ont toujours joué de la musique et chanté (chants de joie, prières chantées, danses, etc..) dans tous leurs rites religieux.

Stèle pharaonique conservée au Musée du Louvre (France). On y voit Djedkhonsouiouefankh, un harpiste de l’époque pharaonique, qui lors d’un rite sacré, se prosterne pour louer et chanter pour Râ représenté assis sur son trône divin. Les textes pharaoniques révèlent que nos ancêtres de la vallée du Nil considéraient ce qu’on appelle aujourd’hui la musique, comme « Les paroles qui réjouissent le cœur de Dieu »

Nos ancêtres ayant civilisé les autres peuples, voila pourquoi ce fait d’avoir de la musique dans les cultes religieux est devenu une pratique partout, même dans les religions dites révélées (Judaïsme Christianisme, Islam). Mais contrairement à la tradition africaine, les adeptes des religions dites révélées, à part le fait de dire qu’ils chantent dans leurs assemblées pour imiter tel ou tel prophète qui chantait, expliquent difficilement ce qui fait qu’ils se retrouvent à chanter lors des cultes dans leurs lieux de prières. 

La musique à l’origine ayant donc une fonction sacrée, pour être un bon musicien, chanteur, fabricant d’instruments de musique, etc… il fallait connaitre les principes régissant l’univers, le sacré, la nature et apprendre les liens unissant la musique à la création toute entière. Et pour connaitre toutes ces choses, il fallait donc passer par l’initiation.

Ainsi des groupes spécialistes initiés dans la musique comme les griots ont existé. 

Scène de l’époque pharaonique. On y voit des sculptures figurant nos ancêtres pygmées. Un des noms donné par nos ancêtres égyptiens aux Pygmées était « Les danseurs d’Imana (Dieu) ». Les Pygmées étant vus depuis l’antiquité comme les plus grands initiés de la tradition africaine, voila pourquoi les Egyptiens les considéraient aussi comme des spécialistes des danses sacrées et rituelles.

Pour nos ancêtres la vie étant sacrée et venant d’Imana, alors ils ont fait en sorte que la musique accompagne tous les moments de la vie. Ces conceptions ont traversé le temps jusqu’à aujourd’hui.

Ainsi on chante et on danse à tous les événements de la vie que sont les fêtes et les réjouissances, les naissances, les mariages, les décès, les funérailles, les combats (chants guerriers), des chants adaptés a chaque contexte. Même au travail la musique est présente et rythme le travail. On peut le voir par exemple lorsque les paysans ou les agriculteurs travaillent dans les champs, ils chantent, tout en répétant les mêmes mouvements ensemble (chorégraphies et cadences de travail).

Les Noirs remarquent bien qu’ils ont une connection instinctive avec la musique et la danse, qu’ils ont le rythme dans la peau comme on dit. Ce n’est pas un hasard. Cette connection spirituelle sort d’une pensée très élaborée et qui est vieille de milliers d’années.

Durant la traite négrière européenne, les Africains déportés en Amérique y ont amené avec eux leurs musiques, chants et danses venus d’Afrique, qui se sont adaptés dans cet endroit du monde. Ils sont ainsi à l’origine de beaucoup de sonorités telles que le Rock, le Jazz, la Soul, le Funk, la Country, le Rnb, le Hip Hop, le Gospel, le Zouk, le Kompa, le Reggae, la Salsa, la Samba, le Tango. Et des artistes africains qui ont influencé l’humanité ou ses musiques comme Michael Jackson, Bob Marley, Kassav, Tina Turner, Jimi Hendrix, Louis Armstrong, James Brown etc…

On peut dire en conclusion de cet article, qu’en Afrique : 
– La musique reproduit la Vibration Divine (Râ) qui est, de manière diverse, présente en toute chose

– La musique doit être faite avec rythme et harmonie selon Maât 

Hotep !

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction du texte de cet article est interdite)

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