La civilisation de l’Ethiopie impériale

Au 12e siècle, les Agaw, Amhara et Tigrinya ont fait naître en Ethiopie cette brillante civilisation, qui allait exister jusqu’au 20e siècle…

Il convient de rappeler au préalable, que nous avons expliqué ici comment le Christianisme a été introduit en Afrique en général, en Ethiopie en particulier. Le pays des Négus – initialement vitaliste (animiste) – a reçu cette religion de l’Egypte, qui elle-même se l’est vue imposer par les occupants romains, au moyen d’une grande violence.

L’Ethiopie n’est pas aux origines du Christianisme comme certains le croient. Et c’est dans cette ferveur développée autour de cette religion européenne, qu’au 14e siècle, les religieux éthiopiens ont écrit le mythe de la relation entre la reine noire de Saba et le roi juif Salomon, relation qui en réalité n’a jamais existé.

Les Falasha quant à eux, sont des Noirs africains qui ont été convertis au judaïsme par des missionnaires juifs – et non pas des Israélites comme on le dit. Tout cela a été détaillé ici.    

Château de Gondar

Le Christianisme a néanmoins joué un rôle dans l’essor civilisationnel des Ethiopiens. La civilisation impériale des peuples Agaw, Amhara et Tigrinya est – avec la civilisation de Dongola au Soudan voisin – une des deux civilisations noires chrétiennes.

Aux origines

Avant la civilisation impériale, a existé en Ethiopie la civilisation pharaonique d’Axoum dont les débuts se situent dans l’antiquité. C’est cette civilisation vitaliste (animiste) qui au 4e siècle a reçu – sous le roi Ezana – le christianisme orthodoxe d’Egypte.

Au 12e siècle, c’est l’Axoum chrétien affaibli par les guerres territoriales, qui est pris par les Agaw qui fondent la dynastie des Zagwé. Ce sont les Zagwé, qui vont ainsi commencer la titanesque construction des monastères qui stupéfient le monde.  

Les monastères

Au 12e siècle, l’empereur zagwé Lalibela décide de faire construire des églises. Il veut surtout disposer de lieux saints, après que les conquêtes musulmanes en Asie de l’ouest et en Afrique, aient fermé la route vers Jérusalem. Par ailleurs, la nouvelle dynastie ayant été contestée par le patriarche égyptien d’Alexandrie – chef suprême du Christianisme éthiopien – peut-être Lalibela a-t-il voulu asseoir sa légitimité. L’empereur fait creuser 11 églises dans la roche qui sont des merveilles d’architecture et de génie civil.  

Les lieux de culte du site de Lalibela ont été littéralement taillés dans la pierre. Après avoir dégagé des blocs cubiques géants, on leur a donné des formes et on y a ensuite taillé des étages, des portes, des fenêtres, des voutes, des reliefs. Ce travail de titan est absolument prodigieux.   

Le site de Lalibela a abrité des prêtres formés pour beaucoup en Egypte, qui enseignaient les sciences exactes, les sciences humaines dont la théologie bien entendu. La vigueur intellectuelle y était particulièrement marquée à l’époque impériale. Lalibela devint même un lieu de culte pour tous les Chrétiens orthodoxes d’Afrique. 

Vue aérienne d’une partie du site. Lalibela a été taillée dans la pierre

La période trouble

En 1270, Yekuno Amlak met fin à la dynastie des Zagwe et restaure l’ancien pouvoir axoumite. La dynastie dite salomonide des peuples Amhara et Tigrinya, se distingue d’abord par un mode de gouvernance nomade. Le but est en partie de consolider l’empire chrétien orthodoxe qui fait faces à de nombreuses guerres contre les musulmans, les vitalistes, les catholiques et les juifs.

L’Ethiopie est traversée partout par des guerres particulièrement sanglantes. L’ampleur et la considérable violence de ces conflits sont un cas rare dans l’histoire entre peuples africains avant la traite européenne. La cour se déplace dans tout l’Etat, emmenant avec elle des milliers de personnes et quantité de matériel. Chaque peuple qui reçoit le roi et son assistance doit offrir l’hospitalité.

Si cette manière de faire a pour but de rapprocher le pouvoir de ses administrés, les peuples visités paient lourdement l’hospitalité exigée. Le royaume s’embourbe dans les querelles religieuses, décline peu à peu, jusqu’à l’avènement du roi Sarsa Denguel.

Gondar, une ville de Châteaux en Afrique

Sarsa Denguel
Representation probablement de son vivant, 16e siècle
Museu de Arte Antiga, Lisbonne

Par la guerre, Sarsa Denguel va étendre le royaume chrétien orthodoxe et prendre le dessus sur les autres groupes religieux. Il est couronné dans l’ancienne capitale Axoum en 1578. L’évènement est ressenti comme une renaissance de l’empire. Ses successeurs Za Denguel et Sousnéyos vont se convertir au catholicisme sous l’influence des portugais. Conversion qui va semer le chaos dans le pays. Za Denguel le paiera de sa vie.

Fasilides, fils de Sousnéyos, va finalement ordonner le retour au Christianisme orthodoxe et faire tuer les catholiques. Fasilides entreprend alors la construction de la nouvelle capitale Gondar qui marque la renaissance culturelle du royaume.

Gondar est une perle du patrimoine africain, bâti dans le climat enchanteur du Lac Tana au nord du pays. Elle devient officiellement capitale en 1636. La ville est protégée par un mur d’enceinte long de 900 m !!!! Le plus grand palais, Fasil Ghebbi, stupéfie par sa beauté et sa sophistication.

Les empereurs successifs vont enrichir la ville de nouvelles constructions. L’enceinte compte près de 20 palais et bâtiments royaux et administratifs, ainsi que des bains. Autour une trentaine de lieux de culte voient le jour. La vie à Gondar fut marquée par un renouveau intellectuel et le luxe à la cour.

Vue aérienne de l’enceinte de Gondar

Le bain construit par Fasilides
De jeunes éthiopiens dans le bain de Fasilidès

Ce n’est qu’en 1855 que Tewodros II déplace la capitale de Gondar à Magdala. Gondar va être détruite par les attaques des Soudanais islamisés. Tewodros II élèvera Menelik II, futur père de l’Ethiopie moderne, qui continuera la royauté chrétienne orthodoxe en fondant la capitale Addis Abeba en 1886.

Le pouvoir chrétien orthodoxe, né en 330 sous Ezana, ne tombera qu’en 1974, avec le coup d’état contre l’empereur Hailé Selassié. 

Hotep !

Par : Lisapo ya Kama ©  (Tous droits réservés. Toute reproduction de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)

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