L’origine africaine du concept des « anges » dans les religions abrahamiques

D’où vient la hiérarchie céleste avec ses anges, archanges, chérubins, etc? Ces concepts sont abondement retrouvés dans les religions dites révélées ou abrahamiques que sont le Judaïsme, le Christianisme et l’Islam. 

Un ange dans la représentation des religions révélées, ici le Christianisme

Les responsables et adeptes des religions abrahamiques avancent simplement que l’existence des anges et de la hiérarchie céleste est révélée et mentionnée dans les écrits de la Torah, la Bible, le Coran, et les documents associés. C’est la raison pour laquelle ils y croient.

Dans le cas des anges, ceux-ci sont décrits comme messagers du divin, c’est cela le sens même de leur nom. Mais les écrits des religions dites révélées montrent qu’ils ont d’autres rôles. Il y a donc un problème lorsque les anges sont uniquement perçus comme messagers. C’est en réalité en allant à la source de ces concepts qu’on peut les comprendre véritablement.

Pour saisir entièrement cet article, nous conseillons à la lectrice et au lecteur de se documenter sur les véritables origines historiques du Judaïsme, du Christianisme et de l’Islam

Les Netjerou, manifestations du Dieu unique

Où les religions révélées ont-elles puisé ces notions d’anges, archanges, chérubins, etc… donnant ainsi naissance à une hiérarchie céleste ? Eh bien ces notions viennent tout droit de l’enseignement religieux des Africains de la vallée du Nil (Égypte, Nubie, etc…).

Rappelons que contrairement à ce qui est couramment enseigné en la matière, la pensée de nos ancêtres égyptiens est monothéiste. Selon ce monothéisme commun à toute l’Afrique authentique, le Créateur-la Créatrice est l’Energie Consciente de tout l’univers. 

L’Energie étant par définition immatérielle et Dieu ne parlant jamais directement, alors le Créateur-la Créatrice est un Être caché, invisible, insondable pour nous car nous sommes bloqués par nos sens. C’est pourquoi nos ancêtres de la vallée du Nil l’appelaient Imana, Amen, Amon etc… Ce nom signifie celui qui est caché ou le caché.

Imana fait fonctionner la création grâce à ses nombreuses manifestations et formes. Ainsi lorsqu’Il-Elle donne de l’énergie au monde, principalement à travers la lumière du Soleil, Il-Elle est Râ ou Ré. Lorsqu’Il-Elle est le bien, alors Il-Elle est Ousiré (Osiris). Lorsqu’Il-Elle est amour, alors Il-Elle est Aïssata (Isis). Lorsqu’Il-Elle est  justice, alors Il-Elle est Maât etc… Ces diverses manifestations ou formes d’Imana, sont appelés Netjerou ou Ntjerou en langue pharaonique (Netjer/Neter/Ntjer au singulier).

Quand on parle donc d’Osiris, Isis, Thot, Anubis, etc… ce ne sont pas divers dieux (polythéisme), mais des manifestations qui forment l’ensemble des facettes du Créateur-de la Créatrice unique (Imana/Amen). Les Netjerou étaient catégorisés et hiérarchisés selon leur rôle, leur action dans le monde visible et invisible.

Esquisse imagée de la théologie d’Iounou (Héliopolis), qui fut la théologie dominante de toute la civilisation pharaonique et de l’Afrique en général. Atoum est la particule créatrice d’Imana et c’est de cette particule qu’est issue l’énergie lumineuse Râ. Imana ou Atoum déploie toutes ses autres manifestations (Osiris, Isis etc…) à partir de sa lumière. Ainsi toutes les manifestations de Dieu sont des émanations de Râ. Râ est la principale manifestation de Dieu, c’est pourquoi on appelait le Créateur encore Imana-Râ ou Amen-Râ. 

Par ailleurs un Être humain qui a fait le bien toute sa vie, qui meurt et passe avec succès l’épreuve du jugement dernier, peut aussi devenir un Netjer, un ancêtre saint, un Akh Iker n Râ (Un esprit parfait et lumineux de Râ). Le cas le plus connu est celui du savant Imhotep.

Ce système de pensée est le même partout en Afrique. On peut le voir chez les peuples Adja-Fon et Ewe (Bénin-Togo actuels) où les Voduns (Sakpata, Heviosso, etc…) sont les diverses facettes du Dieu unique féminin (Mawu) et masculin (Lyssa).

La creation des anges à partir des Netjerou 

La puissance de la civilisation pharaonique en son temps a attiré de nombreux peuples étrangers qui venaient en Égypte soit pour étudier, soit pour chercher du travail, etc… Les Egyptiens au gré de leurs conquêtes en Asie et en Europe ont renforcé leurs contacts avec les peuples étrangers qu’ils ont civilisés. C’est donc au contact des Noirs que les ancêtres des peuples étrangers découvriront le monothéisme.

Cette notion africaine du Créateur unique qui se manifeste sous plusieurs formes et de plusieurs manières, les peuples étrangers la reprendront pour l’adapter chez eux. Ce sont donc les diverses manifestations du Créateur qui donneront naissance à ce qu’ils appelleront les dieux (ex : les dieux grecs, les dieux romains), les divinités, les esprits, les génies, etc…dans le langage courant.

Ainsi Ousiré (Osiris) devient Dionysos en Grèce et Bacchus à Rome. Horo (Horus) devient Appolon en Grèce et à Rome. Maât devient Themis et Justitia respectivement. L’ancêtre justifié Imhotep devient Asclépios et Esculape respectivement etc…

Voila pourquoi l’historien grec Hérodote disait par exemple après ses recherches à son époque, que « la Grèce a reçu de l’Égypte presque tous les noms de ses divinités (…) mes recherches m’en ont convaincu » (Hérodote , Livre II, 50).

C’est au contact des Africains aussi que les ancêtres des Sémites ont découvert le monothéisme. C’est ce que nous avons montré en détail dans nos articles sur les origines historiques du Judaïsme, du Christianisme et de l’Islam. 

Mais comme on l’a vu pour le contexte grec et romain, ce sont les manifestations (Netjerou) du Créateur-La Créatrice unique dans le monothéisme africain, qui sont devenues les divinités gréco-romaines. Alors comment les Sémites ont-ils adapté les diverses manifestations du Créateur en fondant leurs monothéismes ? Eh bien dans le langage religieux des religions révélées, ce sont ces mêmes diverses facettes du Créateur unique qui seront appelées les anges, les archanges, les chérubins, les séraphins, etc…donnant ainsi naissance à ce que les adeptes des religions dites révélées appellent la hiérarchie céleste.

L’analyse des théologiens occidentaux

Cette origine africaine du concept des anges, c’est ce que nous révèle Denys l’Aréopagite, auteur chrétien des premiers siècles du christianisme, qui a abondamment travaillé sur la question des Anges et de la hiérarchie céleste et qui a consacré plusieurs ouvrages à cette question. Dans un passage que nous allons interpréter, Denys l’Aréopagite dans le premier chapitre de son Livre de la Hiérarchie Céleste, nous dit ceci au sujet des anges :

« C’est pourquoi, sous l’invocation de Jésus, la lumière du Père, oui, la vraie lumière qui éclaire tout homme venant au monde, et par qui nous avons obtenu d’aborder le Père, source de lumière, élevons un regard attentif vers l’éclat des divins oracles que nous ont transmis nos maîtres : là, étudions avec bonne volonté ce qui fut révélé, sous le voile de la figure et du symbole, touchant les hiérarchies des esprits célestes. Puis, ayant contemplé d’un œil tranquille et pur ces splendeurs primitives, ineffables, par lesquelles le Père, abîme de divinité, nous manifeste sous des types matériels les bienheureux ordres des anges, replions-nous sur le principe infiniment simple d’où ces splendeurs dérivent.

Ce n’est pas à dire toutefois que jamais elles existent en dehors de l’unité qui fait leur fond; car, lorsque s’attempérant par providentielle bonté aux besoins de l’homme pour le spiritualiser et le rendre un, elles se répandent heureusement en rayons multiples, alors même elles gardent essentiellement une identité immuable et une permanente unité ; et sous leur puissante influence, quiconque les accueille, comme il doit, se simplifie et devient un, au degré où il en est personnellement capable. Effectivement ce principe originel de divine lumière ne nous est (pas) accessible, qu’autant qu’il se voile sous la variété de mystérieux symboles, et qu’avec amour et sagesse il descend, pour ainsi dire, au niveau de notre nature. »

Il saute ici aux yeux que toutes ces explications de théologie chrétienne du chrétien Denys l’Aeropagite sont calquées sur les conceptions du monothéisme africain. 

En lisant ce passage de Denys l’Aréopagite, on se rend compte qu’il décrit le Créateur comme « ce principe originel de divine lumière ne nous est (pas) accessible » qui « se voile sous la variété de mystérieux symboles », donc un être de lumière c’est-à-dire Râ ou Ré; inaccessible et voilé, donc caché (c’est-à-dire Amen/Imana), qui se manifeste de plusieurs manières, qu’il décrit comme « la variété de mystérieux symboles ».

Il décrit ici la hiérarchie céleste (anges, archanges, etc…) comme les diverses manifestations multiples du Créateur (Netjerou ou Neterou) qui « se répandent heureusement en rayons multiples, alors même elles gardent essentiellement une identité immuable et une permanente unité », donc toutes en étant multiples, ne sont que les expressions d’une seule Divinité, d’une seule Unité, d’une seule Identité. On est là dans la reprise pour ne pas dire le plagiat, des conceptions spirituelles africaines, ici dans le Christianisme.

On comprend mieux les propos du professeur archéologue Francois Daumas à la page 281 de son ouvrage intitulé La Civilisation de l’Égypte Pharaonique, où il explique clairement sur la base des connaissances en la matière, que nos ancêtres égyptiens « concevaient très clairement une divinité unique qui déléguait quelque pouvoir particulier à des créatures divines qui équivalent à nos anges ou quelque chose d’approchant. Et quand l’Égyptien cultivé les appelait dieux, il n’était pas troublé, car il savait que ces noms individuels n’étaient que des appellations spécialisées d’une force divine unique. »

En résumé, tout ce que les chrétiens, les musulmans, etc… appellent anges gardiens, anges, archanges, chérubins, séraphins, etc… c’est ce que nos ancêtres appelaient Netjerou (Anubis, Thot, etc…) ou Akhou Iker n Râ (Esprits parfaits et lumineux de Râ), qui composaient leur hiérarchie céleste, et que les profanes appellent « les dieux égyptiens ».

Exemple de l’ange Gabriel

Prenons le cas de celui qui est appelé communément Thot, mais dont le vrai nom est Djehouty. Dans l’enseignement de nos ancêtres, Djehouty possède parmi toutes ses fonctions, la fonction de messager divin. Il est donc celui qui annonce le message divin, la parole divine aux humains.

Cette fonction de messager divin de Djehouty a d’abord été reprise par les Grecs et les Romains où il est respectivement appelé Hermès et Mercure, puis plagiée dans les religions abrahamiques (Judaïsme, Christianisme, Islam). C’est ainsi que Djehouty est devenu l’ange Gabriel des religions dites révélées.

Fresque pharaonique (reproduction par Naville) relatant la naissance divine de la femme Pharaon Hatchepsout. Sur la fresque on voit Djehouty faisant l’annonciation à la reine mère (ici la reine Yahmessou, mère d’Hatchepsout) selon laquelle elle à été choisie par lmana pour enfanter le futur enfant roi divin (pharaon) qui gouvernera le pays. La reine mère ou mère royale est l’equivalent sur Terre de la divine vierge mère Aissata Mari-Amen (Isis aimée de Dieu), qui elle aussi est une manifestation d’Imana. 
Peinture de la célèbre annonciation de « l’Ange Gabriel » à Marie. Ici l’ange Gabriel annonçant à Marie qu’elle a été choisie par Dieu pour enfanter le futur enfant roi divin (Jésus) dans le Christianisme. Marie comme Gabriel ont le disque de lumière solaire à la tête, disque inspiré de Râ. Puisque les Netjerou sont des formes de la lumière divine Râ, alors les anges qui en sont des plagiats portent aussi le disque solaire.  On retrouve ce disque solaire jusque dans l’hindouisme et le bouddhisme, religions aussi aux racines égyptiennes. 
Fresque islamique où on voit l’ange Djibril (Gabriel dans l’islam) qui annonce et révèle le message à Mohamed (prophète islamique).

L’autre question qu’on devrait se poser est l’origine des ailes des anges. Dans les textes des religions dites révélées on n’a globalement pas de descriptions et de représentations exactes de ce a quoi ils peuvent ressembler, même s’il est vrai que l’Islam tente d’en donner. Mais les représentations qui en sont faites à travers les fresques, les statues, etc… les montrent toujours comme des êtres éclatants de lumière, ou comme des êtres à visage humain ou à forme humaine avec des ailes.

Voila, pour les Egyptiens, ce à quoi ressemblait un ancêtre divin dans l’au-delà. On rappelle qu’un ancêtre divin était considéré comme faisant partie des Netjerou. Ce sont les Netjerou qui ont donné les anges. Le symbolisme (homme ailé) parle de lui même en ce qui concerne la source d’inspiration de la représentation des anges.

Donc lorsqu’on vous parle des anges, des archanges, des chérubins, de tel ange ou archange, etc… sachez en fait que ce sont des concepts que les religions dites révélées (Judaïsme, Christianisme, Islam) ont plagié sur la spiritualité de nos ancêtres!

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Hotep !

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)

Notes : 

  • Civilisation ou Barbarie, Cheikh Anta Diop
  • Livre de la Hiérarchie Céleste, Denys l’Aéropagite
  • Hérodote, Livre II
  • Francois Daumas, la Civilisation de l’Egypte Pharaonique
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