Menelik II, l’empereur d’Ethiopie qui vainquit les colons italiens

L’Ethiopie est le seul pays africain à n’avoir pas été colonisé. Nous vous parlons de l’homme qui à l’origine de cet exploit…

Abeto Menelik – Sahle Maryam nait en 1844. Il est le fils du roi Hailé Menekot, gouverneur de la province éthiopienne de Shewa et mort au combat contre le Négus (empereur d’Ethiopie) Tewodros II. Captivé par Tewodros qui l’élève comme un fils, Menelik s’enfuit en 1865 pour prendre le gouvernorat de Shewa.

Menelik

Menelik tente à deux reprises de démettre le nouveau Négus Yohannes VI du trône impérial mais ses alliances avec les égyptiens et les français échouent. Lors de la campagne militaire de Yohannes en 1875, Menelik fait finalement allégeance en s’avançant vers l’empereur, la tête baissée et une pierre portée sur la nuque, en signe de soumission. Yohannes VI le confirme comme gouverneur de Shewa.

Grâce à son armée redoutable, Menelik agrandit son royaume et s’impose comme successeur à la mort de Yohannes, au détriment de Megesha, fils de l’empereur. Il est couronné le 25 Mars 1889 et devient Menelik II.

Le nouveau régent soumet à son autorité les royaumes de l’empire, doublant par la conquête les terres sous sa domination. Il fonde la capitale Addis Abeba et demande aux puissances coloniales présentes dans la région de le reconnaître comme Négus. Le 2 mai 1889, Il signe avec les italiens le traité resté célèbre de Wichale (ville éthiopienne).

Les italiens lui font signer deux versions du traité. Une en Amharique qui lui donne la possibilité d’utiliser la diplomatie italienne pour les communications avec les pays étrangers, l’autre en italien qui l’en oblige, mettant de facto l’empire sous colonisation italienne.

Les italiens voient Menelik comme un Nègre inférieur et se disent qu’il pliera en découvrant le subterfuge. Fou de rage en se rendant compte de la ruse, le Négus refuse de se faire corrompre avec deux millions d’armes, à la surprise des italiens. Menelik va jusqu’à arguer pour légitimer son pouvoir auprès des Européens, qu’il est un chrétien au milieu d’Africains « paiens », sans succès. On rappelle qu’une partie de l’Ethiopie a adopté le christianisme romain au 4e siècle comme expliqué ici.  

Les Européens dans la tradition coloniale de la division, essayent de monter en vain Ras Mangasha, roi de la province de Tigray, contre Menelik pour le démettre. Oreste Baratieri est alors chargé par Rome de soumettre l’empire au pouvoir colonial. Le gouverneur italien de l’Erythrée (alors colonie), sous-estime l’armée de Menelik II, qu’il qualifie de sauvage. Il rassemble 20 000 hommes dans la localité d’Adoua où il attend en embuscade les troupes du Négus.

Oreste Baratieri (1841-1901)
Site de la bataille d’Adoua, nord de l’Ethiopie

Menelik II pendant ce temps assiège une troupe de 1000 soldats italiens, promettant de les libérer si les négociations étaient rouvertes sur le traité de Wichale. Les italiens blessés dans leur fierté par un chef africain, continuent les hostilités. Après 3 mois de station à Adoua, Baratieri, traité de lâche par les autorités italiennes, reçoit l’ordre d’attaquer le camp de Menelik II. Les Ethiopiens, dans la tradition africaine, communiquent des ordres militaires avec le tam-tam, sous les oreilles d’Italiens médusés, qui ne comprennent pas comment on peut jouer de la musique en de pareilles circonstances.

Le 1er Mars 1896, c’est par une nuit froide et brumeuse dans les montagnes éthiopiennes que l’assaut est donné par les italiens. La légendaire bataille d’Adoua commence.

Peinture éthiopienne de la bataille d’Adoua

Désorientés par la géographie, les hommes de Baratieri se divisent en deux et l’armée de Menelik II attaque en s’infiltrant entre eux. Usant de canons, les italiens malgré leurs difficultés prennent l’avantage et au matin le Négus envisage la retraite. Convaincu par ses officiers, il fait venir 25 000 hommes en renfort qui attaquent avec férocité.

Les 196 000 soldats de l’empire, disposant de 100 000 fusils et d’armement lourd, tuent 289 officiers italiens, 2918 soldats européens et 2000 soldats africains alliés à l’ennemi. Les disparus, blessés et prisonniers ennemis sont nombreux également. 954 européens sont portés disparus. L’Ethiopie vient de vaincre l’armée italienne. C’est l’équipement en armes de pointe, acheté surtout à la Russie, qui est la principale explication de cette victoire.

Illustration éthiopienne de la bataille d’Adoua
Le Negus est tout en haut à gauche et supervise les operations
Taytu est en premiere ligne en bas à gauche, arme à la main

L’armée italienne vaincue, Menelik renégocie en position de force le traité de Wichale et s’impose au monde entier comme le Négus d’Ethiopie. Il continue à étendre l’empire en prenant des terres sous protectorat britannique. Le règne de Menelik est marqué par une modernisation importante de l’Ethiopie. Amoureux des technologies, l’empereur fait installer le téléphone, l’électricité, le système postal, développe les systèmes d’éducation et de santé. Sa plus grande œuvre est la construction du chemin de fer d’Addis Abeba à Djibouti, donnant ainsi un accès à la mer à l’Ethiopie.

Menelik II
La famille impériale
L’impératrice Taytu et Menelik II
Les lions ont été domestiqués à la cour éthiopienne jusqu’au temps d’Hailé Selassié
Viaduc sur la voie ferrée d’Addis Abeba à Djibouti

Malade, Menelik institue un gouvernement ministériel pour le suppléer en 1907 et nomme son petit fils Iyasu successeur. Iyasu mineur, le pouvoir est exercé par l’impératrice Taytu. Elle est destituée par un coup d’état du clergé et du gouvernement en 1910 et Iyasu prend le pouvoir en 1911. L’empereur meurt le 12 Décembre 1913, à 69 ans.

Grâce à cet homme de poigne, l’Ethiopie est le seul pays africain à n’avoir pas été colonisé. L’Ethiopie, ancienne province orientale du Soudan pharaonique qui enfanta l’Egypte, est de ce point de vue la plus vieille nation indépendante au monde. Menelik est la plus grande figure de la résistance à l’invasion coloniale et un des plus grands Africains de l’histoire. 

Mausolée du Négus Menelik II
Timbre à l’effigie du Négus Menelik II

Hotep !

Par : Lisapo ya Kama © (Tous droits réservés. Toute reproduction de cet article est interdite sans l’autorisation de Lisapo ya Kama)

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